J’ai déjà rédigé un article similaire sur l’analyse technique et maintenant je vais m’attaquer à l’analyse fondamentale. Car pour moi il n’y a aucun bonne raison de les comparer. Il est préférable de développer ses compétences dans les deux approches pour tirer profit d’une divergence, d’une opportunité globale. Alors nous allons voir dans cet article les principaux indicateurs fondamentales et leurs utilisations. Mais en premier lieu, découvrons qu’est ce que l’analyse fondamentale ? est-elle efficace ? doit-elle être utilisée ?
Qu’est-ce que l’analyse fondamentale ?
L’analyse fondamentale est l’une des deux principales stratégie d’analyse des marchés. Là où, l’analyse technique s’intéresse aux graphiques, c’est à dire à la représentation du cours de l’action d’une entreprise. Dans le but de déterminer des tendances, des consolidations ou encore des reprises de volatilité. L’analyse fondamentale, elle, s’intéresse exclusivement aux données comptables d’une entreprise qui sont comparées à sa valorisation boursière dans le but de déterminer des irrégularités de marché. Et donc de constituer une liste d’actions sous-cotées dans lequel nous souhaitons intervenir incessamment sous peu.
Dans les faits l’analyse fondamentale “se moque” de l’analyse technique, l’inverse est également vrai. L’analyse fondamentale tel qu’elle est construite ne se base QUE sur la réalité des chiffres. Elle n’a pas vocation à attendre une confirmation technique. Même si selon nous, il est préférable d’attendre une validation graphique.
L’analyse fondamentale est au cœur de tous les investissements professionnels. Ces derniers, de part l’importance de leurs capitaux ne peuvent pas trouver de contrepartie rapidement. Ils doivent donc trouver et prendre de très bonnes décisions d’investissements et les tenir.
Warren BUFFETT, considéré par beaucoup comme le meilleur investisseur de tout les temps, utilise aussi l’analyse fondamentale puisqu’il ne faut, pour lui, pas acheter une action qui n’est pas au moins sous-évaluée de 50%[1]. Autrement dit, il faut calculer la valeur théorique de la société avant d’investir.
L’analyse fondamentale est-elle efficace ?
Il faut être clair. Aucune étude n’a prouvé que l’analyse fondamentale et plus efficace que l’analyse technique. Plus largement, aucune étude n’a prouvé qu’un type d’analyse des marchés est efficace. Cependant, l’analyse fondamentale a le mérite d’être moins subjective et c’est une donnée importante.
L’analyse technique souffre d’un manque d’homogénéisation.
L’analyse technique aurait un caractère d’auto-réalisation grâce à sa popularité.[2] Cette thèse est difficile à croire tant le nombre d’intervenants et les techniques sont nombreuses. Les affinités de chacun pour le chartisme par exemple, le carnet d’ordre, le market profil, les Fibonacci, les bandes de bollinger, etc., vont modifier les comportements et rendent cette thèse impensable.
L’analyse fondamentale étudie les principaux chiffres financiers
Des chiffres financiers disponibles, qui sont les mêmes pour tous. Alors oui, il se peut que l’ensemble des intervenants ne prennent pas en compte les mêmes ratios. Que certains ratios soient estimés. Mais dans les faits si l’on parle du PER d’une entreprise (Price Earning Ratio, que nous allons découvrir dans la suite de cet article), tous les intervenants doivent être capables de calculer le même. Le problème d’homogénéisation est moins présent. Le caractère auto-réalisateur aurait plus de sens avec l’analyse fondamentale.
Fait marquant à noter, tous les milliardaires boursiers le seraient devenus grâce à cette analyse financière.[3]
Quels sont les meilleurs ratios à regarder ?
Lorsque l’on cherche sur internet les principaux ratios d’une analyse financière, on peut en trouver plus d’une vingtaine. Alors nous allons, nous, nous intéresser aux 3 principaux.
1. Le PER (Price Earning Ratio)
Le PER est certainement le ratio de valorisation des entreprises le plus utilisé. Il sert à calculer la valeur d’une société et permet d’évaluer si celle-ci est sous évaluée par le marché. Il se calcule de deux façons différentes dont voici les formules :
Ne partez pas tout de suite ! nous allons faire un cas pratique pour mieux comprendre. Prenons l’exemple de RENAULT :
- Nombre de titre : 295 722 284 (attention à bien prendre en compte les obligations convertibles, s’il y en a).
- Cours de l’action : 43.79€ (au 26/11/2019).
- Valorisation de RENAULT : 295 722 284 * 43.79€ = 12.9 Milliards d’euros.
- Résultat net 2018 : 3.302 Milliards d’euros.
- PER actuel : 12.9 / 3.302 = 3.9 (Ouf un PER positif, un PER négatif n’est pas exploitable.)
En réalité, le PER actuel n’existe pas. C’est l’une des critiques du PER puisqu’il varie en fonction du cours de l’action, c’est à dire du sentiment des investisseurs, de la psychologie. Il est plus conventionnel de parler du PER Glissant (calculé pour l’année antérieure) et le PER Projeté (en prenant en compte les prévisions de bénéfices).
Il est important de comparer les PER des sociétés d’un même secteur. Plus le PER est proche de 0, plus la société est sous-évaluée par rapport au marché. On entend dire que la société n’est pas chère! MAIS il faut aussi essayer de comprendre pourquoi ce PER est bas au regard des autres ratios, car investir en fonction du PER seul n’a aucun sens.
2. La VE (Valeur d’Entreprise)
Puis appuyer et continuer sur la valeur de l’entreprise, nous allons calculer la VE en prenant en compte le niveau de trésorerie et les dettes de l’entreprise. La Valeur de l’Entreprise correspond à la réelle valorisation de la société indépendamment de sa situation financière qui est prise en compte dans le calcul :
Continuons notre exemple avec RENAULT- Valorisation boursière : 295 722 284 * 43.79€ = 12.9 Milliards d’euros.
- Trésorerie : 6.1 Milliards d’euros en 2018
- Dettes financières courantes : 46.876 Milliards d’euros en 2018
- Dettes financières non courantes : 6.209 Milliards d’euros en 2018
- VE de RENAULT: 12.9 – 6.1 + 46.876 + 6.209 = 59.885 Milliards d’euros.
Le niveau d’endettement de RENAULT rend sa Valeur Entreprise élevé, non pas qu’elle vaut chère. Mais qu’elle vous coutera chère en cas de rachat puisque la trésorerie est faible et l’endettement élevé. Plus la VE d’une société est faible et plus elle devient intéressante.
3. Le price-to-book ratio
Le price-to-book s’intéresse aux fonds propres de l’entreprise, c’est-à-dire ce qu’elle possède. Dans le cas de Renault ce sont des usines, des machines, des terrains et la trésorerie auquel ont retire les dettes… Ces capitaux propres représentent une garantie pour les créanciers et permettent de rendre l’entreprise solvable. Attention cependant à la qualité de ces capitaux qui est difficilement estimable. A l’instar de RENAULT, l’absence de cash (trésorerie) et des actifs immobiliers spécialisés, vieillissants, dans un secteur d’activité cyclique et difficile, nous permettent de s’interroger sur la réelle qualité des fonds propres du groupe RENAULT.
- Valorisation de RENAULT : 295 722 284 * 43.79€ = 12.9 Milliards d’euros.
- Fonds propres/capitaux propres ou encore actif net 2018 : 36.145 Milliards d’euros en 2018.
- Price to book : 12.9/36.145 = 0.35
Un price-to-book inférieur à 1 est signe d’une société sous évaluée, ici surement par la qualité du patrimoine.
Ces 3 premiers ratios doivent vous permettent de comprendre comment fonctionne l’analyse fondamentale. Les bilans comptables aident à réaliser un nombre important d’indicateurs fondamentales plus ou moins efficients. Il vous appartient donc de comprendre ces bilans pour sélectionner quelques ratios qui vous intéressent.
Ce que les défenseurs de l’analyse technique penseront de cet article
Cet article a pour ambition de vous ouvrir l’esprit sur l’utilisation de l’analyse fondamentale si vous ne l’utilisez pas encore. Bien entendu, ce n’est pas une méthode miracle et les anomalies de marché sont nombreuses. Un titre très peu chère peut le rester jusqu’à temps que vous perdiez votre solvabilité d’investisseur particulier. Alors gérer votre risque quel que soit vos convictions.
Je suis conscient que les données financières des entreprises peuvent être mal interprétées et plus ou moins transparentes. Que les grosses mains peuvent avoir des informations avant qu’elles ne sortent. Alors on vous dira que tout est déjà dans les cours, qu’un PER bas ne traduit qu’une anomalie de l’entreprise que vous n’avez pas su voir dans les chiffres comptables. Oui c’est possible, mais encore une fois, les ratios présentés dans cet article sont très limitatifs et insuffisants pour vous spécialiser. La lecture des communiqués, de l’actualité et les interviews de la gouvernance permettent de répondre à certaines interrogations supplémentaires.
La dernière tendance, les critères extra-financiers :
Enfin, de nos jours ce sont également les données extra-financières qui sont regardées par les investisseurs :
- Quel est la politique de l’entreprise en matière d’environnement ?
- Quel est la qualité du management ? qui sont les leaders ?
- Quelle confiance dégage l’entreprise dans sa communication au regard de ses résultats ?
- Quelle est la politique sociale ?
- Comment est redistribué la richesse ? entre les actionnaires ? les salariés ? quelle est la rémunération du dirigeant ? est-ce juste ?
Ces données extra-financières participent à l’évaluation d’une entreprise sous l’angle fondamentale, elles ne sont pas à négliger.
Le débat sera sans fin
Commencer à vouloir gagner avec l’analyse fondamentale, c’est devenir un expert de la spécialité. Prenez du temps pour vous familiariser avec les différentes notions comptables. Évaluer la pertinence de tel ou tel ratio, et en fonction de votre stratégie, ne conserver que les plus intéressants pour vous.
Il n’est pas impossible de ne sélectionner que des entreprises ayant un fort risque d’OPA (tentative de rachat). En investissant sur des entreprises très spécialisées, en croissance et faiblement valorisée.
Donc OUI, pour moi il restera possible de gagner avec l’analyse fondamentale. Mais il vous faudra aller plus loin que le PER ou le price-to-book. Vous devrez comparer les secteurs d’activité, les taux de croissance, les capitaux propres, le sentiment du marché, l’actualité et ne pas oublier, pour moi toujours, une confirmation technique (tendance haussière, volume) car je ne souhaite pas opposer les deux approches.
Références
- [1] Comment Warren Buffett choisit une action, https://www.upsidebourse.com/comment-warren-buffett-choisit-action/, [en ligne], dernière consultation le 26 novembre 2019.
- [2] Analyse technique, https://fr.wikipedia.org/wiki/Analyse_technique, [en ligne], dernière consultation le 26 novembre 2019.
- [3] L’Analyse Fondamentale est bien plus efficace que l’Analyse Technique, https://www.bourseensemble.com/analyse-fondamentale-plus-efficace-que-analyse-technique/, [en ligne], dernière consultation le 26 novembre 2019.
Les éléments comptables présentent certainement leurs limites à certains égards. Dans la mesure où, comme le rappelle l’article, pour les sociétés qui ont les moyens de “bien” s’entourer, les données comptables peuvent-être allègrement falsifiés, en vue de présenter un visage le plus attrayant possible auprès des actionnaires, de les rassurer.
Par ailleurs, la valeur de la société peut, comme expliqué plus haut, reposer sur des paramètres extra-comptables.
Un exemple où les données comptables, à elles seules, ne sont pas représentatives de la valeur :
Avant que ses produits novateurs ne soient connus et reconnus par les actionnaires potentiels, on peut avancer que le cours d’Apple était sous-valorisé et que la seule lecture des données comptables n’était pas suffisante.
Inversement, il existe probablement de nombreux exemples de sociétés où il serait bon de se remémorer leur valeur intrinsèque ainsi que leurs données comptables (comparativement à leur cours le plus haut en février 2020). Les arbres ne montent jamais jusqu’au ciel. Le meilleur des élastiques non-plus.
Bonjour Val et merci pour vos commentaires toujours pertinents. A plaisir de vous lire.